La défense de Nicolas Sarkozy, un sport extrême !

Publié le par webmasters94

Au cœur de la tempête, les courtisans et fidèles du Président rivalisent d'audace pour être au plus haut face aux critiques. La meilleure façon de sombrer.

Dans la défense du Président, la polémique fait du hors piste... ©Alain Bachelier / FlickR CC

Comment le défendraient-ils s'il en venait aux mains ? Depuis qu'il a insulté un promeneur du Salon de l'Agriculture en le traitant de « pauvre con », le Président voit se lever autour de lui un mur d'avocats de tous calibres dont on se demande où ils vont chercher de telles plaidoiries. Cette « simple » affaire d'invective publique déchaîne une créativité rhétorique qui, si elle n'était pas si pathétique, pourrait se révéler très divertissante. On imagine assez bien un petit texte à la manière de Rostand qu'on intitulerait « la tirade du con » :

Optimiste : « Il faut quand même que la France aille pas si mal pour que ce soit ça le sujet d'actualité » (Jean-Pierre Raffarin, Grand Rendez-vous Europe 1 / Le Parisien / LCI, 24 février)

Pédagogue : « Nicolas Sarkozy s'est exprimé de façon à ce que son interlocuteur le comprenne. Je trouve ça très bien que le Président s'exprime comme chaque Français. » (Brice Hortefeux, BFM, 24 février)

Victimaire : « Ce qui peut clocher, c'est qu'une personne puisse avoir des propos un peu désagréable à l'égard du Président, voilà ce qui est choquant. » (Rachida Dati, RTL, 25 février)

Flagorneur : « Le président de la République va au contact des Français. […] Est-ce qu'ils (Chirac et de Gaulle) allaient au contact comme Sarkozy ? La réponse est non ! » (Xavier Bertrand, RMC, 25 février)

«Des méthodes qui relèvent de la Stasi», Pierre Lellouche.

Stasi, fascisme et autres comparaisons élégantes
Si les propos de ces courtisans relèvent de la simple mauvaise foi, l'acharnement de certains pousse à des raccourcis qui passent vite du grotesque à l'inquiétant. Que penser d'un ministre du Travail qui affirme comme un principe de loi que « on n'a pas le droit, dans ce pays, d'humilier le Président » ? Mais ce n'est qu'une anecdote, comparé à la sortie du député UMP Pierre Lellouche, qui s'est fendu lors d'un débat sur France Info de la comparaison suivante : évoquant les « micros cachés, caméras cachées », il a dénoncé une gauche qui utilise des méthodes « qui relèvent de la Stasi » et qui intente « autant de procès de Moscou que nécessaire à Françoise de Panafieu ou à Rama Yade ». Nos confrères des « brigades rouges » du Parisien apprécieront l'amalgame.

Il faut dire que cet escadron de garde du corps avait pris un certain élan : depuis que la popularité présidentielle est en chute libre, ils se sont vigoureusement armés de parachutes. Dans l'ordre de l'extrême, Lionnel Luca, député UMP des Alpes-Maritimes, conserve une certaine avance : évoquant des précédents « d'acharnement » contre des personnalités politiques, il n'a rien trouvé de plus pertinent que d'évoquer Pierre Bérégovoy et Roger Salengro, deux hommes politiques que des rumeurs insistantes avaient poussés au suicide.

 

 

La prochaine étape de la polémique dans la majorité présidentielle ? ©Carf / FlickR CC

Roger Karoutchi, ministre des Relations avec le Parlement, a néanmoins réussi à percer avec une formule qui rivalisait dans l'abjection et le hors sujet. Quand a surgi l'affaire du SMS à Cécilia Sarkozy, il a comparé le chef de l'Etat ni plus ni moins qu'à Jean Zay, cible d'une campagne de calomnie antisémite dans la presse d'extrême droite durant les années 1930, ajoutant que « cela a contribué au fait qu'il soit assassiné. » Les journalistes assimilés à des collabos antisémites complices d'assassinat ? C'est Rama Yade qui doit se sentir toute minable avec son « charognards ».

Pourquoi s'arrêter ?
On aimerait pouvoir sourire et entendre un peu plus de pirouettes comme celle de Xavier Darcos, le ministre de l'Education nationale, fustigeant « les trois petits cochons qui étaient 17 et qui criaient au loup » en réaction à l'appel pour une Vigilance républicaine. Mais ces comptines de bonne guerre ne semblent pas être à la hauteur de l'homme défendu : la courtisanerie impose de hurler plus fort que n'importe qui !

Sur l'affaire de la rétention de sûreté, pourquoi donc s'arrêter au classique reproche de la droite à la gauche qui « prendrait le parti du coupable plus que celui de la victime » ? Si les socialistes critiquent l'utilisation du premier magistrat de France pour rendre la loi rétroactive, c'est, selon Nadine Morano, qu'ils « se rangent clairement du côté des assassins », c'est tout ! Prenez-y garde, thuriféraire du chef de l'Etat, ils sont dix, cent, mille qui ne reculerons devant rien pour décrédibiliser toute critique trop directe, toute remise en cause personnelle. Roger Karoutchi a même confessé, suite à l'affaire du Salon de l'Agriculture, des tentations coupables : « Je ne suis pas sûr que je n'aurais pas dit pire, je me demande si je ne lui aurais pas mis une baffe ». Marins pêcheurs, socialistes, banlieusards, ouvriers, journalistes et agriculteurs, vous voilà prévenus !

 

 

Mardi 26 Février 2008 - 00:05

 

Sylvain Lapoix

 

 
 
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