Coups de canif dans les contrats

Publié le par webmasters94

 


Après quatre mois de négociations, patronat et syndicats ouvrent la voie à une plus grande flexibilité du cadre salarial. Décryptage des nouveautés.
 

Du modèle danois, souvent cité en exemple avec sa «flexisécurité», on est encore très loin. Mais le projet d’accord sur la «modernisation du marché du travail», sorti vendredi soir de la négociation entre le patronat et les syndicats, introduit dans le droit social français quelques vraies innovations.

La principale est la rupture «conventionnelle» -- c’est-à-dire par consentement mutuel - du contrat de travail. Elle introduit une troisième voie de séparation employeur-salarié, entre licenciement et démission. Autre nouveauté: le CDD à durée variable «pour objet précis», qui reprend l’idée du «contrat de mission» avancée en 2004 dans le rapport de Michel de Virville.Vendredi soir au siège du Medef, patronat et syndicat négociaient encore les derniers ajustements de cet accord. Il devrait être signé par au moins trois confédérations syndicales. La CFDT, la CFTC, la CFE-CGC et Force ouvrière devraient donner leur réponse la semaine prochaine. Seule la CGT a clairement laissé entendre dès vendredi qu’il était peu probable qu’elle signe cet accord.

Rupture à l’amiable

Nouvelle forme de séparation entre l’employeur et le salarié, la rupture à l’amiable, dite «conventionnelle», devrait permettre de rompre le contrat de travail d’un commun accord. A la différence de la démission, il permettrait au salarié de bénéficier de ses allocations chômage. Pour l’employeur, cette rupture le mettrait à l’abri de tout recours ultérieur devant les prud’hommes. Le salarié disposera de deux semaines pour se rétracter après signature, et la transaction devra être homologuée par le directeur départemental du travail dans un délai de quinze jours.

CDD à objet défini

Un nouveau type de contrat à durée déterminé, appelé contrat à objet défini, serait mis en place, à titre expérimental, pour les ingénieurs et cadres. D’une durée «incertaine», mais comprise entre 18 et 36 mois, ce contrat ne pourrait être mis en place sans la signature d’un accord de branche ou d’entreprise. La fin du contrat interviendrait dès que le salarié aurait rempli la «mission» pour laquelle il était emabuché. Cette rupture donnerait droit à une prime de 10% de sa rémunération au salarié. Cela ressemble à l'interim..

Période d’essai rallongée

Les périodes d’essai étaient jusqu’ici du ressort des conventions collectives, les juges sanctionnant les durées manifestement excessives. Elles seront désormais définies par la loi. Pour les ouvriers et employés, la durée est fixée à un à deux mois. Elle sera de deux à trois mois pour les agents de maîtrise et techniciens, et de trois à quatre mois pour les cadres. Toutes ces périodes seraient renouvelables une fois par accord de branche- et pourraient donc aller jusqu’à huit mois pour les cadres.

Davantage de droits après une rupture de contrat

Patronat et syndicat ont pendant des semaines débattu de la «transférabilité» ou de la «portabilité» des droits. L’enjeu: assurer au salarié privé d’emploi des garanties qui facilitent son reclassement et raccourcissent sa période de chômage. Parmi eux, deux ont focalisé l’attention: la formation et la complémentaire santé. Pour ne pas alourdir l’ardoise en cas de licenciement, le Medef souhaitait que seule la moitié des droits individuels à formation (DIF) acquis par le salarié puisse être garantie après son licenciement. Les syndicats ont obtenu que la totalité de ces droits lui soient versés s’il souhaite engager une formation pendant sa période de chômage. Un fond unique de péréquation entre les différents organismes collecteurs pour la formation assurera le portage de ces droits (d’où le terme de «portabilité»). Quant à la complémentaire santé, elle serait garantie pendant un tiers de la période ouvrant droit au chômage, avec un minimum de trois mois.

Indemnisation chômage

Sur l’indemnisation du chômage, les syndicats souhaitaient obtenir de nouvelles garanties. De leur côté, les organisations patronales voulaient que l’accord précise qu’en aucun cas les nouvelles mesures ne devaient entraîner une hausse des cotisations d’assurance chômage. Au bout du compte, les uns et les autres ont décidé de botter en touche, et de renvoyer la balle d’une part à la négociation Unedic, qui doit se conclure avant l’été, d’autre part aux pouvoirs publics. Ils demandent ainsi qu’une prime soit accordée aux jeunes chômeurs non indemnisés de moins de 25 ans. A condition qu’ils aient déjà travaillé. Ils ont par ailleurs aligné l’indemnité minimale de licenciement sur celle du licenciement économique, soit un cinquième de mois de salaire par année d’ancienneté.

L.P. et F. W.-D.
LIBERATION : samedi 12 janvier 2008
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